L’obéissance de l’enfant et la soumission à l’autorité
Une pédagogie différente est-elle nécessaire ?
Il n’est pas si rare de lire qu’il est indispensable pour l’enfant que l’adulte sache poser un cadre plutôt rigide et restrictif et établir des règles qui ne peuvent être remises en question. Par conséquent, vont y être associées des sanctions, des punitions en cas de non-respect ou parfois des récompenses, si elles sont suivies.
Pourquoi ne pas y préférer des interdits qui ont du sens et en fonction de notre seuil de tolérance, des limites respectueuses de chacun ?
Pourquoi ne pas responsabiliser l’enfant, plutôt que le contraindre : c’est ce que pose comme base d’une pédagogie nouvelle, l’application de la théorie de la dissonance cognitive.
Poser un cadre autoritaire et se faire obéir : quels effets dans la durée ?
Découvertes SCIENCES Hors-série Juin 2021 « 50 EXPERIENCES DE PSYCHOLOGIE » (p 54-55) L’obéissance libre chez les enfants.
Une expérience pour explorer les usages pédagogiques de la dissonance cognitive.
Qu’est-ce-que la dissonance cognitive ?
Selon cette théorie de la psychologie sociale établie par Léon Festinger en 1957, lorsque les circonstances amènent une personne à agir en désaccord avec ses croyances, ses valeurs, cette personne éprouvera un état de tension inconfortable appelé dissonance, qui, par la suite, tendra à
être réduit, par exemple par une modification de ses croyances dans le sens de l’acte. « Un levier puissant pour qui veut influencer autrui... »
Dissonance et punition
J.Merrill Carlsmith et Elliot Aronson, psychologues américains, ont imaginé une expérience avec des enfants à qui l’on présente des jouets pour lesquels ils ont manifesté leur intérêt.
Dans un premier contexte, est posé un interdit d’y jouer avec fermeté et menace forte de châtiment sévère et dans un deuxième contexte, l’interdit posé est plus nuancé et la punition encourue plus légère. La grande majorité des enfants respecte l’interdit.
L’expérience est renouvellée plusieurs semaines plus tard. Les enfants menacés d’une punition légère sont bien plus nombreux à respecter l’interdit et évaluent le jouet bien moins intéressant que 3 semaines auparavant.
Conclusion :
Face à une menace faible, les enfants ont modifié leur appréciation du jouet interdit.
Face à une menace forte, la dissonance induite par l’interdiction ferme de jouer est levée du fait de cette menace.
L’expérience est reproduite en 1965 par Jonathan Freedman en nuançant l’interdit de jouer avec le robot pour le deuxième groupe parce que ce n’est pas bien. Les résultats enregistrés plusieurs semaines après sont similaires à ceux précédemment obtenus.
Conclusion :
Face à une menace faible, les enfants intégrent les normes de comportement.
Dissonance et récompense
En 1973, Mark R.Lepper, professeur de psychologie à l’université de Stanford, imagine une suite à ces expériences. Il propose dans un deuxième temps aux enfants de participer à un jeu pour lequel les gains sont réels et très motivants. Toutefois difficile d’obtenir un score élevé sans tricher, ce que comprennent vite les enfants. (=> dissonance)
Soumis à une menace forte, les enfants n’hésitent pas à tricher face à la promesse de gain.
Soumis à une menace faible, les enfants de ce groupe sont bien plus nombreux à résister à la tentation.
Conclusion :
Les enfants soumis à une menace faible, acquièrent une norme de comportement, ne pas céder à la facilité d’une action malhonnête, sans aucune pression.
Une attitude de l’adulte plus nuancée produit-elle des effets plus durables ?
Oui, sans aucun doute.
Un oui en faveur d’alternatives à la punition et du non-recours à la récompense.
Un oui pour oser dire « non » sans chantage.
Un oui pour poser des limites fermes et respectueuses.
Un oui pour inciter à réparer les conséquences de ses actions...
Un grand oui au changement de paradigme éducatif et relationnel !
Cet article ne reçoit pas de commentaire.